Le Caire de notre correspondante
L'estrade est plantée juste au pied du Mogama, bâtiment de style stalinien du ministère de l'Intérieur, symbole de toutes les lenteurs administratives de l'Egypte. Le grand écran est prêt. Des haut-parleurs géants annoncent l'arrivée imminente de «l'homme qui peut sauver l'Egypte». C'est Yasser Hamza qui le dit. A 24 ans, étudiant, il n'a connu que Hosni Moubarak. Aujourd'hui, dit-il, «il faut du changement, et pour ça, il n'y a qu'Ayman Nour. C'est le seul à parler vrai». Un grondement extatique parcourt les 2 000 personnes rassemblées devant l'estrade : l'idole arrive. Très à l'aise, la quarantaine râblée, Ayman Nour fend la foule, tout sourire, rejoint la tribune et martèle son credo, mêlant libertés politiques, sociales, économiques, fin du chômage. «Vingt-quatre ans de Moubarak, ça suffit !» s'écrie-t-il.
Surprise. L'hiver dernier, Ayman Nour a marqué les esprits lorsque son parti al-Ghad (Demain) a été le premier depuis vingt ans à être créé et autorisé en Egypte. Mais en février, ce même Ayman Nour était expédié en prison pour d'obscures accusations de falsification de documents officiels. Une affaire dont le jugement a été reporté après l'élection. Cette incarcération, cependant, lui a valu sa célébrité. Très médiatisée par la presse internationale, elle a fait de ce personnage au passé équivoque un symbole de l'opposition à Moubarak, le mettant au centre d'un bras de fer entre l'Egypte et les Etats-Unis. Au point que Condoleezza Rice a