Yala (Thaïlande) envoyé spécial
Thira Songsuk, professeur à l'école Ba Ngoi Si Ne, dans la province thaïlandaise de Yala, ne se sépare plus de son arme à feu. Pour lui, c'est une simple question de survie : en vingt-sept ans de carrière dans le sud profond à majorité musulmane du pays, cet instituteur charpenté comme un bûcheron dit n'avoir jamais connu de période aussi dangereuse, même au temps des maquis communistes qui combattaient dans cette zone au cours des années 70. «Sans pistolet, nous sommes désavantagés. S'ils nous tirent dessus, on ne peut que s'enfuir. Avec une arme, on peut riposter. Et si on riposte, ils déguerpissent», lance ce vétéran. «Ils», ce sont les insurgés, des centaines, peut-être des milliers, de jeunes musulmans rebelles à l'autorité du gouvernement central thaïlandais qui multiplient les assassinats et les attentats à la bombe. Depuis la recrudescence des violences en janvier 2004, environ 800 personnes ont été tuées, dont près de 200 par les forces de sécurité qui tentent de mater la rébellion par la force, non sans quelques grosses bavures.
Vengeance. Personne ne semble encore savoir clairement qui est derrière cette vague de violences sans précédent. Pour beaucoup, ces jeunes, prêts à tirer sur un enseignant qui rentre chez lui ou à décapiter un villageois bouddhiste, ont été eux-mêmes victimes des violences des forces de sécurité, ayant perdu qui un père abattu par les militaires, qui un frère enlevé par des policiers et disparu à jamais. Quelqu