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Libération

La frontière d'El Aleb ou le ballet des clandestins

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publié le 18 octobre 2005 à 4h08

Oujda envoyé spécial

Les breaks Peugeot disloqués sont lancés à fond sur la piste, chargés jusqu'à la gueule de bidons d'essence de trente litres. Les épaves algériennes ne freinent qu'une fois arrivées en territoire marocain, une fois passé les minuscules tas de pierres qui indiquent la frontière, à l'est du village d'El Aleb. L'essence est transvasée, 120 dirhams (12 euros) le bidon. Les Marocains chargent leurs propres épaves ou leurs motocyclettes usées (qui peuvent transporter jusqu'à huit bidons) et repartent vers la ville d'Oujda et ses environs, où l'essence sera revendue au bord des routes, deux fois moins cher que dans les stations services.

A Oujda ­ un demi-million d'habitants, au nord-est du Maroc ­, la frontière avec l'Algérie, comme ailleurs, est officiellement fermée depuis 1994, après l'attentat de Marrakech. Certes, la seule route goudronnée qui relie Oujda, côté marocain, à Maghnia, côté algérien, est cadenassée. Mais quelques kilomètres vers le nord ou le sud sur ce plateau aride à 500 m d'altitude, et les chemins et les pistes permettent facilement de passer.

«Parfois, on reprend les mêmes le lendemain»

Cette frontière est aussi et surtout le point de passage, chaque année, de milliers de Noirs-Africains qui suivent les chemins clandestins vers l'Europe, après être passés par le Mali. Oujda, c'est l'étape d'avant la côte atlantique, d'où ils tenteront d'atteindre en barcasse les îles espagnoles des Canaries. C'est aussi l'étape d'avant Tanger, d'où ils tente