Ce samedi soir d'octobre, Stefan Meller, ambassadeur polonais en Russie, dîne avec des amis dans un restaurant géorgien de Moscou. Soudain son portable sonne. Il pense à sa femme, pianiste, rentrée à Varsovie pour le festival Chopin. «C'était une voix inconnue, se souvient-il, celle du Premier ministre Kazimierz Marcinkiewicz qui me proposait le portefeuille des Affaires étrangères.» Sans parti, Meller, 63 ans, veut être sûr de ne rien renier de ses convictions, notamment proeuropéennes. Aussi répond-il : «oui, mais...» Rassuré après une soirée de discussions avec Marcinkiewicz, le diplomate, issu de l'intelligentsia éclairée de Solidarité, devient l'un des ministres clés du nouveau cabinet conservateur.
Trahison. Sa nomination surprend, voire choque. Pour les plus intransigeants, en s'alliant à un gouvernement à gauche sur les questions économiques, mais très anticommuniste, nationaliste et rétrograde sur le plan des moeurs, il a trahi les idéaux de Solidarité. Pour les pragmatiques, sa présence est la garantie que ce cabinet, investi au Parlement grâce au soutien de deux partis extrémistes, mènera une politique internationale raisonnable, loin du repli sur soi que l'on pouvait craindre. «Ma nomination est la preuve que l'on se trompe en qualifiant ce gouvernement d'antieuropéen», expliquait-il mercredi, de passage à Paris, à des journalistes.
Malgré tout, sa présence reste une incongruité dans un gouvernement dont l'un des premiers gestes a été de supprimer l'Office pour l'é