Londres de notre correspondante
Le jeu politique britannique offre souvent le spectacle d'une rare cruauté. La victime du moment, c'est Charles Kennedy, leader des libéraux-démocrates, le petit parti coincé entre les travaillistes et les conservateurs. Il avait, de fort longue date, la réputation d'un buveur impénitent, un secret de polichinelle masqué par son parti et oublié lors de la dernière bataille électorale, qui avait permis aux Lib-dem de remporter 62 sièges de députés à la Chambre des communes, un résultat record et inespéré. Mais depuis plusieurs semaines, l'inquiétude grandit chez les Lib-dem sur l'incapacité de Kennedy, 46 ans, à résister face à l'ascension de la nouvelle idole du parti conservateur, David Cameron. Et le problème d'alcool a resurgi, comme par miracle. La presse menaçait de révéler son combat contre le scotch.
Face à la pression, cet Ecossais bon vivant a préféré prendre les devants : il a avoué jeudi soir son fâcheux penchant, indiquant qu'il tentait de «régler un problème de boisson». A la faveur de cette confession, Kennedy a remis son mandat en jeu, appelant à une élection et espérant le soutien des militants. Un calcul stratégique dangereux. L'aveu a déclenché la curée. Vendredi, près de la moitié des 23 membres de son cabinet fantôme lui ont écrit pour lui retirer leur soutien. Un eurodéputé estimait qu'il est un «homme mort». Deux piliers du parti lui ont fixé un ultimatum pour lundi, menaçant de démissionner de leurs mandats de député s'il