Entre un poète de gauche et un économiste libéral, les jeux semblent faits. Trente-deux ans après la «révolution des oeillets» et la fin de la dictature en 1974, les Portugais s'apprêtent à élire leur premier président de droite. Selon quatre sondages publiés vendredi, l'ancien Premier ministre conservateur Aníbal Cavaco Silva a même des chances de s'imposer dès le premier tour de la présidentielle, ce dimanche, face à cinq candidatures de gauche.
«Utopie». Les deux principaux partis ont ressorti leurs têtes d'affiche des années 80. L'autoritaire professeur Cavaco Silva, 66 ans, incarne, pour le Parti social-démocrate (centre droit), le décollage économique du Portugal durant les dix années fastes de son gouvernement (1985-1995). En face, le Parti socialiste misait sur un ultime come-back de Mario Soares, l'octogénaire «père de la démocratie», trois fois Premier ministre et chef de l'Etat en 1986 et 1991. Pari, semble-t-il, perdu : dans les sondages, Soares n'est crédité que de 12 à 17 % des intentions de vote, derrière le franc-tireur du PS Manuel Alegre. A 69 ans, ce vétéran de la politique joue la carte de l'indépendance et, poète estimé, veut apporter «plus de rêve et d'utopie» aux Portugais, nation parmi les plus pessimistes d'Europe sur leur avenir.
Désenchantement. Mais une majorité d'électeurs fait plus confiance à l'austère Cavaco Silva, face à la crise économique du pays : une croissance inférieure à 1 %, un taux de chômage proche de 8 %, en hausse constante depuis s