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Libération
Interview

Evoluer au rythme des catastrophes

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Boris Cyrulnik, neuropsychiatre, et Jean-Marie Pelt, botaniste, veulent croire que sauver la Terre est encore possible malgré les déséquilibres engendrés par l'homme.
publié le 7 février 2006 à 20h16

Quand le neuropsychiatre Boris Cyrulnik croise le botaniste Jean-Marie Pelt, ils causent avec allégresse de la fin du monde et de son effet sur l'âme humaine. Rencontre enthousiaste à Marseille.

Pensez-vous que nous puissions encore sauver la planète ?

Jean-Marie Pelt. La réponse est forcément oui. Si vous répondez non, vous restez devant votre télé ou vous jouez au Scrabble. Bien sûr, si vous dites oui, vous tirez un trait sur une vie tranquille et facile, mais vous avez au moins le sentiment de faire votre devoir, sans baisser les bras. On peut sauver la terre, mais le codicille est que nous devons impérativement changer, et vite.

Boris Cyrulnik. Oui, on peut encore sauver les meubles puisque nous changeons un peu à chaque catastrophe. L'évolution humaine se fait au travers de catastrophes. Le mot lui-même veut d'ailleurs dire cela : «cata», c'est la coupure, et «strophe», le discours. Quand ça s'effondre, on déploie un tel génie qu'on invente autre chose. Aujourd'hui, notre système s'emballe et il évolue irréversiblement vers la perversion. Donc, oui, nous allons évoluer, changer, mais nous l'aurons payé cher, car ce sera au prix d'autres catastrophes. L'homme a toujours déséquilibré les systèmes naturels, mais jamais avec autant de pouvoir qu'aujourd'hui.

J.-M. P. Sur la théorie des catastrophes, je suis totalement d'accord. Une bonne catastrophe fait bouger les choses. Prenez l'exemple de La Nouvelle-Orléans. Avant ce terrible déchaînement de la nature, peu de maires se sentaient