Yaoundé de notre correspondante
Assis dans son petit bureau, installé sur une des collines qui entourent la capitale camerounaise, Jean-Pierre Amougou Belinga fait partie de ceux qui ont récemment découvert le filon des «homos» dénoncés et l'exploite à fond. Il y a trois semaines, son hebdomadaire, l'Anecdote, jusqu'ici quasi inconnu, a publié un «Top 50 des homosexuels présumés du Cameroun». Au menu : des ministres, des hauts fonctionnaires, des hommes d'affaires, des évêques, des musiciens, des sportifs et même... des morts ! Depuis, ce journal bat tous les records de vente : le dernier numéro a été imprimé à 40 000 exemplaires, contre 6 000 pour les quotidiens les plus lus. Lorsque les stocks sont épuisés, les photocopieuses prennent le relais des rotatives. Et les copies se monnayent à un tarif parfois vingt fois plus élevé que l'original.
Déontologie. Si les trois quotidiens privés nationaux ont condamné le manque de déontologie de l'Anecdote, plusieurs autres publications n'ont pas eu ces pudeurs : «Voici les pédés de chez nous», «l'épouse d'un ministre homosexuel en larmes»... Chaque jour, un journal s'épanche sur le sujet.
Les victimes de ces dénonciations commencent à saisir la justice. Hier, le tribunal de Yaoundé a enregistré les plaintes en diffamation de cinq ministres ou ex-ministres, dont celle de l'ex-secrétaire général de l'Organisation de l'Union africaine (OUA) William Eteki Mboumoua. Dans la presse, un haut fonctionnaire se défend : «Je ne suis pas homosexue