Tbilissi correspondance
Une chanson irrévérencieuse, un puissant offensé, un chanteur persécuté. L'histoire est simple et n'attirerait pas l'attention si elle n'avait lieu en Géorgie, passée il y a deux ans dans le «camp de la démocratie». Plus précisément dans la province de Gori, ville natale de Staline, seule localité dans toute l'ex-URSS à conserver une statue de vingt mètres de haut du Petit Père des peuples. Né moins d'un siècle plus tard dans la même ville, Michiko Kochkadze est amer. Ce chanteur populaire, qui a vécu longtemps en Russie, était revenu à Gori, «encouragé par les paroles» de Mikhaïl Saakachvili. Au lendemain de la révolution des Roses de 2003, le nouveau président géorgien, ancien avocat à New York, avait appelé les émigrés à venir reconstruire le pays. «Aujourd'hui je n'ai pas ma place en Géorgie. Et je vais devoir quitter mon pays en cachette», déclare-t-il tristement. Son crime : avoir adapté à l'intention du gouverneur de la région de Gori, dans le centre de la Géorgie, une chanson satirique écrite à l'époque soviétique sur Edouard Chevardnadze, l'ancien dirigeant du pays. Le chanteur, très connu dans le coin, avait voulu réagir au poème à la gloire du gouverneur que des enseignants d'une école maternelle avaient appris aux enfants. A l'image des poèmes sur Staline composés il y a soixante ans... Mikhaïl Kareli, nommé à son poste début 2004 par Saakachvili, n'a pas apprécié le pamphlet et a menacé l'impudent, qui se cache aujourd'hui en attendant un