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Libération
Reportage

A Melilla, l'islam regardé de travers

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Nombreux dans l'enclave espagnole, les musulmans sont perçus comme une menace.
publié le 24 mai 2006 à 21h19

Melilla envoyé spécial

«Vous allez voir, c'est le Bronx, ici !» avait averti le chauffeur de taxi, pas très rassuré. La «Cañada de la muerte» a mauvaise réputation. Ce quartier aux maisons multicolores accrochées aux flancs d'une colline aride, à un jet de pierre de la frontière avec le Maroc, serait un refuge pour trafiquants de haschisch et islamistes radicaux. Dans le centre de Melilla, on vous explique aussi que des adolescents y reçoivent souvent les policiers à coups de pierres. Ce matin-là, pourtant, l'ambiance est plutôt paisible. «On raconte n'importe quoi sur ce quartier, on n'y risque rien ! lance Halal, un des responsables de la mosquée Assalam. Ce qui est vrai, c'est que personne ne s'occupe de nous. On est 5 000 à 6 000 habitants. Or il n'y a pas une école, un centre de santé, une aire de jeux ou une maison de retraite !» Autre certitude : la «Cañada de la muerte» est un quartier 100 % musulman. Un ghetto qui surplombe Melilla, enclave espagnole en terre africaine, un confetti de Schengen en plein Rif marocain.

Citoyens de seconde zone. La «Cañada» condense les maux dont souffrent les 26 600 musulmans de Melilla, soit 40 % de la population recensée ­ même si, de l'avis général, leur nombre réel dépasserait les 50 %. Dans l'enclave, hormis une minorité de négociants prospères, la communauté islamique est de loin la plus mal lotie : 77 % d'échec scolaire dans le secondaire (dont une bonne partie d'analphabètes), 70 % de chômeurs ; et, sur les 1 100 fonctionnaires,