En 1996, au moment des événements de Saint-Bernard, j'étais en campagne électorale. J'ai un souvenir assez flou, mais je me souviens très bien de l'émotion que ça a soulevé. Il est devenu clair à ce moment-là que la France était entrée en contradiction avec ce qu'elle appelle, avec orgueil et à juste titre, ses valeurs républicaines. J'ai vécu en France comme étudiant au début des années 70. A l'époque, le débat politique était très dur, mais les étudiants étrangers ne connaissaient pas cette forme de mesures radicales. J'observe aussi que cette crispation sur l'immigration profite à l'extrême droite. La France n'est plus un pays aussi accueillant qu'avant. En Roumanie, son image a changé depuis une dizaine d'années. Aujourd'hui, 1,6 à 2 millions de Roumains vivent et travaillent à l'étranger, mais très peu en France. Ce n'est plus un pays où l'on est accueilli sans préjugés, où l'on peut travailler légalement et gagner sa vie décemment. Il y a près d'un demi-million de Roumains en Italie, presque autant en Espagne. Il y en a en Grèce, en Allemagne, aux Pays-Bas, aux Etats-Unis. Pourtant, en France, tout devrait être plus facile pour les Roumains, qui sont francophones, comme les Français l'ont découvert au début des années 90. C'est une perte pour la France. Il faudrait que l'immigration fasse l'objet d'un projet national qui dépasse le clivage gauche-droite et ne soit pas un enjeu électoral. Quant aux quotas, ils répondent aux problèmes que se pose l'Etat français, pas aux
Saint-Bernard 10 ans
«La France n'accueille plus sans préjugés»
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par Christophe Ayad
publié le 23 août 2006 à 23h01
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