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Toute morale mérite salaire en Chine

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Chaque bonne action des citoyens est comptabilisée, comme les agios dans une banque.
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publié le 5 octobre 2006 à 23h34

Pékin de notre correspondante

De petits livrets rouges s'entassent par milliers dans le bureau de madame Wu, directrice de la «banque morale des citoyens» d'un quartier de Changsha, dans le Hunan. Madame Wu est vice-secrétaire de son comité de quartier, relais du Parti communiste. Chaque jour, elle noircit avec entrain les livrets de ses voisins. Colonne crédit : «Nettoyage du jardin public, dix heures», «visites à personne âgée, huit heures», «ménage chez un malade, trois heures»... Bonnes actions qui s'inscriront au débit d'un autre livret rouge à chercher dans les piles. Remis sur pied, le malade aura intérêt à combler son découvert moral.

Bonnes actions. Dans ce quartier, plus d'un habitant sur deux a son numéro de compte moral, tout doit s'additionner, s'équilibrer, la fraude est toujours possible. Madame Wu écrit, tamponne les pages de son sceau à encre rouge, ordonne à ses employées d'aller contrôler les dires des déposants de bonnes actions. C'est une «banquière» affairée, et très consciencieuse. Elle connaît ses bons clients et aussi les mauvais, portés sur l'exploitation de l'autre plus que sur le don de soi. Mais elle manque de moyens.

Dans un autre quartier de la ville, l'un de ses collègues que nous avons contacté a inventé un logiciel pour comptabiliser la moralité des habitants. Les carnets que crache son ordinateur ressemblent aux livrets d'épargne de toutes les banques du monde. Sauf que les bonnes actions remplacent les yuans. N'est-ce pas la preuve qu