Islamabad de notre correspondante
Sur un terre-plein d'Islamabad, en face de la Cour suprême du Pakistan et du Parlement, de grands portraits adossés aux arbres interpellent les passants. Une vingtaine de familles se relaient ici depuis six semaines pour tenter de savoir ou sont passés les maris ou les fils, enlevés par les services secrets pakistanais. Le mari d'Amina Janjua, un homme d'affaires, a disparu depuis le 30 juillet 2005, alors qu'il se rendait à une réunion de tablighis (missionnaires musulmans) à Peshawar. La jeune femme brandit sa photo : «J'ai tellement peur qu'on le torture.»
Selon un rapport accablant d'Amnesty International, des centaines de personnes ont été enlevées illégalement au Pakistan depuis que le pays s'est lancé dans la «guerre contre le terrorisme». La plupart ne sont toujours pas réapparues et le gouvernement refuse de fournir toute information sur leur situation.
Enveloppée d'un grand voile, Mme Nissa est une mère au foyer qui n'avait pas vraiment l'habitude de sortir de chez elle. Mais depuis que son fils a été enlevé, voilà deux ans, elle se débat avec les autorités. «Mon fils était ingénieur à la Commission pour l'énergie atomique du Pakistan. Il a été kidnappé le jour même de son mariage, murmure la vieille dame, les larmes aux yeux. Nous sommes allés voir la police, qui nous a répondu : "Nous ne pouvons rien faire, votre fils est avec les services secrets."»
Détentions arbitraires. On lui a également fortement dé