Abdul Ruzibiza est l'un des témoins cités par le juge Jean-Louis Bruguière dans son ordonnance incriminant le président rwandais Paul Kagame et neuf de ses proches pour l'attentat du 6 avril 1994 contre l'avion de son prédécesseur Juvénal Habyarimana. A l'époque, Ruzibiza, qui a publié Rwanda, l'histoire secrète (Ed. du Panama, 2005), était membre de l'Armée patriotique rwandaise (APR), la branche armée du Front patriotique rwandais (FPR) de Paul Kagame.
Vous faisiez partie du «Network Commando». S'agissait-il de l'équipe chargée de l'attentat ?
Non ! Je ne sais pas pourquoi on a exagéré ça. Le Network, c'était un service de renseignements dont les membres provenaient de trois groupes : le High Command, l'équivalent de la garde présidentielle, la Direction of Military Intelligence (DMI) et un groupe qu'on appelait «les techniciens». Je faisais partie de cette dernière catégorie : notre rôle était de faire des reconnaissances en profondeur et des opérations spéciales. Pour cela, il fallait parfaitement connaître le Rwanda, sa langue, sa géographie : c'était mon cas, parce que je suis né dans le Bugesera, et que je connais bien Kigali. Au total, c'était un réseau assez large : rien que pour les techniciens, nous étions environ 300. En tant qu'infiltré, mon travail consistait à effectuer des patrouilles de reconnaissance au sud et à l'est de l'aéroport de Kanombe, dont la colline de Massaka, où l'attentat a été commis. Nous savions seulement que nous étions en train