Nouveau rebondissement dans le très sensible dossier de l'enquête du juge Bruguière sur l'attentat du 6 avril 1994 qui a causé la mort de l'ex-président rwandais Juvénal Habyarimana et déclenché le génocide dans lequel 800 000 Tutsis et opposants hutus ont été tués. Résumé des épisodes précédents : il y a dix jours, le juge antiterroriste émettait neuf mandats d'arrêt visant des proches du chef de l'Etat rwandais, Paul Kagame, pour leur implication dans l'attentat, et recommandait la mise en accusation du Président, protégé par son statut, devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda. Cette «bombe» judiciaire a provoqué la colère des autorités rwandaises, qui ont rompu toute relation diplomatique avec Paris. Aujourd'hui, un témoin abondamment cité par Bruguière dans son ordonnance (pages 23 à 25) accuse le magistrat d'avoir déformé son témoignage pour coller à son instruction.
Surprise. Emmanuel Ruzigana, entendu le 29 mars 2004, explique dans une lettre à Bruguière, dont Libération s'est procuré une copie, «ignorer l'existence du Network Commando», présenté par le juge comme celui qui a abattu l'avion, et n'avoir «aucune connaissance sur la personne qui aurait tiré sur l'avion», n'étant pas à Kigali le 6 avril. Quelle ne fut pas sa surprise de découvrir, à la lecture de l'ordonnance, que Bruguière avait fait de lui un membre du commando, chargé de la protection du site de tir de missile depuis la colline de Masaka, et un témoin visuel de l'atte