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Libération

Reconnaissance et réconciliation

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Hrant Dink oeuvrait pour la reconnaissance du génocide, mais aussi pour le dialogue.
publié le 20 janvier 2007 à 5h34

A Istanbul

«Mon état d'âme est celui d'un pigeon inquiet», écrivait Hrant Dink il y a une semaine dans un long article publié dans Agos, le principal hebdomadaire arménien de Turquie qu'il avait fondé il y a dix ans. Un texte tragiquement prémonitoire. Inlassable combattant pour les droits de l'homme, il répétait volontiers que «la question des minorités est l'un des aspects d'un combat plus général pour le pluralisme et la démocratie». Il s'adressait aux membres de sa communauté, 60 000 personnes pour la plupart concentrées à Istanbul, derniers représentants d'une population de plus d'un million de personnes au début du siècle dernier et depuis anéantie par les massacres de masse entre 1915 et 1917, puis par l'émigration. Mais il était aussi très écouté par les intellectuels libéraux turcs et tous ceux qui se battent pour que la République fondée par Mustafa Kemal sur les décombres de l'Empire ottoman après la Première Guerre mondiale affronte la question du génocide arménien.

Condamnation. C'est aussi pour cela qu'il était depuis des années l'une des cibles privilégiées des nationalistes turcs et de la justice. 170 intellectuels ont déjà été poursuivis depuis deux ans, notamment au titre de l'article 301, qui sanctionne les insultes à la nation et l'identité turque, inscrit dans le nouveau code pénal pourtant accepté par l'UE. A chaque fois, le mécanisme est le même : une plainte est déposée par des associations nationalistes, puis les juges ouvrent les