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Libération

Intellectuels turcs, le retour de la peur

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publié le 6 février 2007 à 5h53

Ankara envoyé spécial

Les menaces sont arrivées par mail, accompagnées d'insultes sur sa mère et ses aïeux. Des avertissements explicites aussi bien contre lui que contre d'autres intellectuels «traîtres» comme le romancier et Prix Nobel Orhan Pamuk que «rien ni personne ne pourra protéger quand nous voudrons le tuer». Professeur de sciences politiques à Ankara et coauteur en 2004 d'un rapport officiel dénonçant «le climat de paranoïa» entourant les droits des minorités en Turquie, Baskin Oran est habitué à recevoir ce genre de messages d'intimidation. Mais depuis l'assassinat le 19 janvier par un jeune chômeur ultranationaliste de Hrant Dink, journaliste symbole des Arméniens de Turquie, il est réellement inquiet. Les autorités lui ont finalement attribué un garde du corps, comme à quelques dizaines d'autres intellectuels ou activistes des droits de l'homme considérés comme autant de cibles potentielles. Certains, comme le romancier Orhan Pamuk, ont néanmoins préféré quitter le pays au moins pour quelque temps.

«Irrationnel». «Il y a un climat général de lynchage encore plus préoccupant qu'un complot organisé : il s'agit d'un phénomène irrationnel, incontrôlable, avec des dizaines de milliers de jeunes paumés ultranationalistes prêts à tout contre ceux qu'ils considèrent être une cinquième colonne de l'étranger et des gaiours [infidèles, ndlr]», explique Baskin Oran, indigné que les deux plaintes déposées les années précédentes après des me