Tallinn correspondance
La tête baissée, le casque à la hanche, le soldat de bronze ne regarde même pas les passants qui viennent déposer des oeillets rouges et allumer des bougies à son pied. Comme las de l'agitation dont il est à l'origine depuis le 9 mai 2006. Ce jour-là, des nationalistes estoniens avaient violemment pris à partie des russophones venus comme chaque année pour y célébrer la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Résistance. Erigé en 1947 par l'Union soviétique pour commémorer la victoire sur le nazisme, ce monument, qui porte le nom de Monument des libérateurs de Tallinn, divise l'Estonie. Pour la majorité des russophones, qui représentent 30 % de la population de ce pays de 1,3 million d'habitants, il symbolise la résistance au nazisme et rend hommage à ses victimes. Pour les Estoniens, qui n'ont pas digéré l'annexion de leur pays par Staline en 1940, il symbolise l'occupation soviétique et «nos 200 000 compatriotes victimes de répressions en tout genre», explique Urmas Paet, ministre des Affaires étrangères.
La guerre des mémoires est lancée. Le monument, qui, selon les russophones, a été édifié sur les dépouilles de soldats de l'armée rouge, doit être déplacé dans un «lieu plus approprié», un cimetière en dehors de la ville, comme le demande le Premier ministre Andrus Ansip pour désamorcer la querelle. Il est soutenu par les nationalistes de l'union Pro Patria-Respublika. «Existe-t-il des villes en Europe avec des monuments à la gloire