Montréal envoyée spéciale
La voix est faible, cassée. Elle décrit l'horreur : la fumée qui s'échappe des maisons brûlées, la fuite éperdue, les tirs, la famille dispersée, la capture, puis les tueries. La femme qui parle était adolescente lors du génocide contre les Tutsis au Rwanda, en 1994, qui a fait quelque 800 000 morts parmi la communauté tutsie. Cachée du public par un paravent de verre givré, elle est le témoin «C16» dans le premier procès pour génocide et crimes contre l'humanité jamais intenté au Canada. En face d'elle, dans un box vitré, se trouve Désiré Munyaneza, un homme de 40 ans qu'elle dit avoir vu commettre des meurtres. La veille, une autre femme l'avait accusé de viol. Jusqu'en 2005, il vivait normalement au Canada avec sa femme et ses deux enfants.
C'est la première fois que le Canada utilise une loi adoptée en 2000 qui lui permet de poursuivre des étrangers responsables de crimes contre l'humanité ou de crimes de guerre commis à l'étranger contre des étrangers mais présents (résidents ou de passage) sur son territoire. En vertu de cette loi, le Canada pouvait juger ou extrader Désiré Munyaneza. Il a choisi la première solution. Un choix que saluent les réfugiés rwandais. «C'est un pas sur la voie de la prévention. Il est très important de montrer aux bourreaux potentiels que le monde sera trop petit pour eux», explique Jean-Paul Nyilinkwaya, de l'association Page-Rwanda (Parents et amis des victimes du génocide au Rwanda).
Preuves. Cette association