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Les dernières grands-mères russes du Caucase

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Le reste de la communauté a fui une région devenue hostile.
publié le 10 mai 2007 à 7h42

Ingouchie, Tchétchénie envoyée spéciale

«Depuis un an, j'essaie de vendre ma maison, mais comme je suis russe, on ne veut m'en payer que moitié prix.» Tonia, 68 ans, trop effrayée pour donner son nom de famille, est une des dernières Russes de Troïtskaïa, un village cosaque fondé en 1845 au nord-Caucase, en plein coeur de ce qui est devenu la république d'Ingouchie. «Mes ancêtres vivaient ici depuis trois générations au moins», raconte Tonia, rencontrée devant sa petite isba russe, reconnaissable à ses fenêtres sculptées. «Mais peu importe, aujourd'hui il faut partir. Mon fils, qui travaillait ici comme électricien est déjà parti à Krasnodar [dans le sud de la Russie, ndlr]. Sous prétexte qu'il était russe, les Ingouches refusaient de le payer. Quel peuple, ces Ingouches !» dit-elle dans une grimace de dégoût.

«Génocide». Avec la deuxième guerre de Tchétchénie, gagnée par l'armée russe, Moscou a réaffirmé en 2000 sa souveraineté sur le nord du Caucase. Mais la population russe, chassée en masse de Tchétchénie et d'Ingouchie pendant les deux guerres des années 1990, continue à fuir le Caucase. Sans que personne ou presque n'y prête attention, près de deux siècles de présence russe sont en train d'être effacés. En Ingouchie, les Russes représentent moins de 3 % de la population, contre 49 % au référendum de 1959 (déportés par Staline au Kazakhstan, Ingouches et Tchétchènes commençaient alors tout juste à rentrer chez eux). Au Daguestan, les Russes ne