Jonathan Littell, prix Goncourt 2006 pour les Bienveillantes (Gallimard), a réagi pour Libération à la mort de Raul Hilberg.
Que représente pour vous Raul Hilberg ?
C'est l'auteur incontournable sur la Shoah. Il a été le premier à la conceptualiser, à en avoir une approche presque structuraliste. Il s'est focalisé spécifiquement sur la Shoah, il a montré comment la bureaucratie allemande a été un acteur à part entière. Il s'est dégagé de tous les autres historiens dès la première édition de la Destruction des Juifs d'Europe, qui est tellement frappante même si elle est passée presque inaperçue à l'époque. Tout ce qui vient après s'appuie sur lui. En outre, en anglais, c'est un texte magnifiquement écrit. C'était vraiment un styliste, ce qui est rare chez les historiens. Il y a un humour presque insolite et comme une musique dans le déroulement du livre.
Vous l'avez lu quand ?
Quand j'ai fait les recherches pour mon bouquin, il y a six ou sept ans. Mais j'y suis retourné souvent. C'est presque un dictionnaire. Il m'a été utile en permanence, je m'y référais tout le temps pour tout ce qui concerne les structures bureaucratiques, les tableaux d'organisations, quand je cherchais un détail sur le déroulement de certaines séquences. Il y a dans le livre un imaginaire très spatial.
Comment expliquez-vous que «la Destruction des Juifs d'Europe» ait été si mal accueilli par les instances juives ?
Je ne sais pas. Mais je sais qu'il en a énormément souffert. Je crois qu'