Les nouvelles de Flannery O'Connor exposent souvent avec grand humour et subtilité les préjugés des «braves gens de la campagne» - qui étaient souvent les siens aussi. Cette partie de la Géorgie était encore à vif d'invraisemblables violences qui s'y étaient commises, et les bois alentour semblent propices à des rencontres comme celle de la grand-mère et du désaxé, dans «Les braves gens ne courent pas les rues», ou aux creuses homélies de Mme Cop, qui ne l'empêchent pas de se faire incendier dans «Un cercle dans le feu». Après tout, c'est au pénitencier de Milledgeville que les lyncheurs venus d'une bourgade voisine ont fait sortir de force Leo Frank, «le juif libidineux» des ballades populaires, pendu en 1915 pour le meurtre de Mary Phagan, fillette de 13 ans retrouvée zigouillée dans une fabrique de crayons à Marietta. «Little Mary Phagan/She left home one day/Leo Frank he met her/With a brutish heart, we know».
Naissance d'une nation était sorti la même année, enflammant le pays et ravivant la flamme raciste hystérique du vieux Sud spolié. Little Mary ressemblait plus à Pickford qu'à Lilian Gish, mais le Lustful Jew de Brooklyn valait bien un mulâtre de cinéma comme bouc émissaire.
Fantômes. Dans «le Festival des Azalées», O'Connor écrivait sur les meurtres du Partridge Festival (six victimes canardées en place publique par un fou furieux), qui avaient réellement eu lieu sur le site du nouveau palais de justice de Milledgeville. P