Le monde en général et les Etats-Unis en particulier sont en train de découvrir ce que nombre d'observateurs s'époumonaient à dire depuis des années : s'il y a bien, aujourd'hui, un Etat voyou parmi les Etats voyous, s'il y a bien un Etat à la fois despotique, terroriste, miné par l'islamisme radical et marqué au sceau, de surcroît, d'une fragilité préoccupante, c'est le Pakistan. Les «zones tribales» ? Cette fameuse zone grise, intermédiaire entre l'Afghanistan et le Pakistan, où le pouvoir central renonce à faire régner sa loi ? Non. Le Pakistan lui-même. Ce Pakistan dont les Etats-Unis ont fait le pivot de leur stratégie dans la région et qui est pourtant, en tant que tel, cet Etat à la fois terroriste et d'une instabilité littéralement terrifiante. Ce Pakistan officiel que je connais, pour ma part, depuis presque quarante ans, c'est-à-dire, en réalité, depuis la guerre du Bangladesh, et dont le monde commence à s'aviser que des pans entiers de l'appareil d'Etat (une fraction entière, en tout cas, de ses services secrets, le redoutable ISI) sont sous l'influence d'éléments liés à Al-Qaeda.
Forteresse. Cas de Hamid Gul, ancien directeur de l'ISI, qui est devenu, à l'âge de la retraite, un thuriféraire non dissimulé de Ben Laden. Cas de Mahmoud Ahmad, l'un de ses successeurs, qui dirigeait l'agence au moment du 11 septembre 2001 et qui est fortement soupçonné d'avoir contribué au financement de l'attaque. Cas de cette mosquée que j'ai visitée fin 2002 et qui s'appelle Binori