Assis sur leurs talons, une trentaine de novices drapés dans leurs robes rouge sombre récitent des soutras bouddhiques en pali en balançant la tête, sous le regard débonnaire de deux bonzes plus âgés. Dans le centre de méditation attenant, des femmes assises sur le sol en teck, leurs jambes repliées, méditent dans un silence total devant une statue dorée du Bouddha. D'autres marchent avec une extrême lenteur, dans un mouvement coulé et ralenti, selon les préceptes de la «méditation de pleine conscience».
Dans ce monastère du centre de Rangoun, comme dans les autres aux alentours, la vie normale a, en apparence, repris son cours, deux mois après la répression sanglante des manifestations de bonzes. Des chiens sont assoupis sur les marches de béton qui mènent à une statue colossale du Bouddha, un lieu prisé par les touristes de passage. Torses nus, des bonzes s'aspergent de seaux d'eau pour leur douche du soir.
«La paix est revenue, tout est tranquille», assure un guide édenté qui propose ses services aux visiteurs étrangers.
Amertume. Il suffit pourtant de gratter un peu la surface pour se rendre compte que cette normalité n'est qu'une façade. Assis sur sa couche, l'abbé du monastère compulse une pile de livres sur le dhamma - les enseignements du Bouddha - qu'on lui a apportés. Visage rondelet et regard vif derrière ses lunettes, il laisse immédiatement fuser son amertume. «Je hais le gouvernement. Je ne pourrais jamais leur pardonner d'avoir fait tirer sur des