Quand les guérilleros sont venus chercher son mari, Marisol a juste cru qu'ils voulaient discuter avec ce représentant municipal «d'un projet de route pour le village». En trente ans de vie dans l'Arauca, une région frontalière avec le Venezuela, la paysanne colombienne s'était habituée à voir passer les groupes d'extrême gauche dans son hameau de La Arabia. Mais après quelques minutes, des rafales ont retenti : son époux venait d'être abattu au bord du chemin poussiéreux.
Exode. Devant les villageois, les six membres des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) ont aussitôt lâché un ordre : «Vous avez dix jours pour partir.» Ils ont répété le même discours aux alentours, en tuant au moins trois autres habitants. La nouvelle a couru de ferme en ferme, ce 6 janvier : la guerre entre les anciens alliés marxistes, les Farc et l'Armée de libération nationale (ELN), venait de reprendre. Le lendemain, Marisol et ses sept enfants ont abandonné leur maison de planches, suivis par la centaine de familles de la bourgade. Dans l'exode, «on ne trouvait même pas de véhicule pour s'enfuir», se rappelle une voisine, réfugiée avec Marisol dans la petite ville de Saravena. En quelques jours, plus de 2 000 personnes ont déserté la zone.
Dans les années 1980, les deux guérillas colombiennes avaient pourtant fait de l'Arauca un bastion commun. L'extorsion de fonds d'entreprises pétrolières, autour du principal gisement colombien, puis des autorités locales riches des