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Libération

Orphelins de terres depuis 1956

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publié le 22 février 2008 à 2h25

C'était en décembre 1956, Li Zhi avait 8 ans. Le nom du camion est resté gravé dans sa mémoire : Libération. Toute la famille avait dû embarquer à l'aube et sans bagages pour une destination inconnue. «Une famille déplacée, 1 000 familles protégées», disait le slogan du parti pour justifier la déportation de 287 000 paysans.

Comme des centaines d'autres dans le Shaanxi, le village des Li serait bientôt englouti par le pharaonique barrage de Sanmen sur le fleuve Jaune. Ce chef-d'oeuvre cher à Mao allait sonner la fin des inondations meurtrières et l'électricité pour tous. Les paysans devaient contribuer à l'effort national. Le voyage a duré dix jours jusqu'au Ningxia, aux confins de la Mongolie intérieure. «Un désert glacé, de vent et de sables, qui servait aux camps de rééducation», raconte Li Zhi. Rien n'y a jamais poussé, on y mourait de faim. Des familles tentaient de s'évader de cet enfer, et de rentrer au pays. Chaque fois, elles étaient renvoyées dans leur désert.

Maisons rasées. Au bout de quatre ans, l'opération était un fiasco total. Le barrage de Sanmen, ensablé par les limons, a été quasiment abandonné, le réservoir vidé et la terre restituée aux brigades de production. Mais les malheurs de la famille Li ont continué : «C'était la Révolution culturelle, Pékin avait envoyé des citadins cultiver nos terres.» Dans les années 70, une fois les jeunes instruits repartis, des dizaines de milliers de paysans ont décidé de rentrer. Ils ont retrou