Dans son atelier décati de la Vieille Havane, Victor, un sculpteur à la peau parcheminée, claironne: «Depuis la révolution énergétique en 2006, on a changé toutes les ampoules incandescentes pour des basse tension ! Il n'y a plus de problème d'électricité ! Viva Fidel !» Trois heures plus tard, dans l'un des cafés où bat le coeur culturel de la ville, Calle 23, le mojito se déguste dans l'obscurité. Le courant a ses humeurs. «Ici, on se lève en frottant son ordinateur pour qu'un génie fasse apparaître une connexion Internet. La journée, on court : après des bus bourrés, après des boulots, après des plans», se marre Marina, ingénieure en informatique. La vie quotidienne tient du mélange du labyrinthe, dans sa forme la plus élaborée, et du hamster dans sa roue. Un Ubuland tropical. «N'importe où ailleurs les gens seraient devenus fous», résume un diplomate sud-américain.
Diaspora. La bataille se joue au jour le jour. «C'est devoir acheter des socquettes blanches d'écolier obligatoires alors qu'on n'en trouve pas. L'explosion des divorces à cause des trois générations contraintes de vivre sous le même toit, faute de logement. L'automédication permanente alors que Cuba produit le plus grand nombre de médecins par habitants, mais les exporte dans le monde entier, etc.», énumère Marina. A ses yeux, le défi du nouveau pouvoir sera économique et social, car «la traditionnelle incrimination de l'embargo américain, un vrai scandale, n'explique pa