Correspondance à Pékin Loin des camps de travail, ou des prisons «modèles», le quotidien ordinaire des détenus de droit commun chinois a de quoi faire pâlir, même dans les centres de détention les plus banals. Témoignage.
Ling Lei (1), 29 ans, moniteur de sport pékinois, est d'un naturel calme et enjoué. Mais quand il commence à raconter ses souvenirs derrière les barreaux sa voix tremble et son regard se perd. Il a passé deux cent vingt jours dans un centre de détention provisoire avant d'être jugé, à cause d'une rixe dans un restaurant. Un client ivre avait insulté sa femme. Il lui a cassé une bouteille sur la tête, causant une coupure profonde dans la joue. Manque de chance, c'était le fils d'une famille de hauts cadres.
Puanteur. Ling Lei s'est retrouvé menotté et conduit dans un centre de détention provisoire où on lui a promis qu'il ne resterait que «quelques jours». Il y est resté sept mois, sans contact avec l'extérieur, aucune lettre, aucun coup de téléphone, aucune visite (alors que la loi en prévoit une par mois), et seulement les informations rapportées par les nouveaux détenus.
Cette forme de détention en attente de jugement est employée couramment en Chine (2), et chaque centre est géré différemment. Celui de Lin Lei est situé dans la banlieue de la capitale. «C'est pire que la prison. En prison au moins on peut être une douzaine par cellule, avec un lit chacun. Mais là, on est une quarantaine dans une grande salle. Les trois-quarts de l'espace so