De notre correspondante au Caire. Elle est la première à en rire. «La clandestinité, c'est dur ! Avec notre look, on se reconnaît immédiatement entre nous, et quiconque est un peu familier avec la confrérie nous repère de suite, à commencer par les services de sécurité !» Nous ? Avec sa grande abaya (1) en jean sombre, qui ne laisse poindre que ses pieds chaussés de baskets et sa besace en cuir, Aïcha est un des nombreux visages des Soeurs musulmanes, la branche féminine, fondée en 1933, des Ikhwan al-Muslimin, la confrérie interdite mais tolérée, des Frères musulmans.
«Pour reconnaître une Soeur, c'est facile, pouffe-t-elle. Une abaya, pas de couleurs vives, ni de maquillage, et on ne s'épile pas les sourcils !» Dans sa famille, «tout le monde est Ikhwan». La jeune femme a suivi assidûment les activités sociales parrainées par les Frères : jardin d'enfants, fêtes ou excursions. Et c'est tout naturellement qu'à l'université du Caire, elle a rejoint la cellule islamiste de sa faculté. Un petit groupe, comparé à d'autres facs, une dizaine d'étudiantes seulement, qui se réunissent à la sauvette, entre deux cours, assises en rond dans un coin des salles de prières que l'on trouve dans chaque bâtiment de la gigantesque université cairote. «Une fois nous avons été vues par les hommes de ménage, qui en ont parlé à la sécurité. Ça nous a obligées à trouver un autre endroit pendant quelque temps pour ne pas être prises sur le fait.»
Jou