Il est vingt heures, samedi soir à Islamabad, quand une puissante détonation fige la capitale pakistanaise dans la stupeur. Au cœur de la ville, le luxueux hôtel Marriott et ses 290 chambres sont pulvérisés par l'explosion d'un camion suicide. Quelques heures plus tôt, à deux cents mètres de là, le président fraîchement élu, Asif Ali Zardari, prononçait son discours de politique générale devant les parlementaires pakistanais. «Je vaincrai ce cancer qu'est le terrorisme», avait-il promis dans un exposé violemment hostile aux insurgés talibans et à leurs alliés d'Al-Qaeda. La réponse de ceux qu'il avait qualifiés de «terroristes lâches et ennemis du Pakistan» ne s'est pas fait attendre.
Le large boulevard, qui borde la façade du palace, vient de disparaître dans un nuage de débris et de terre. La cinquantaine de voitures qui stationnait devant l’établissement n’est plus qu’un enchevêtrement de tôle déchiquetée. La façade, une ruine lépreuse et embrasée. Dans le hall, les corps se mêlent aux débris de verre et de mobilier. Au rez-de-chaussée, les premiers survivants apparaissent hagards, piétinant les corps de ceux qui étaient leurs voisins de table quelques minutes plus tôt.
Des policiers arrivent très vite, suivis de peu par un cortège d'ambulances. Sur ce qui reste du parking principal, la police de la circulation d'Islamabad recueille le premier blessé, un homme d'une quarantaine d'années : sa démarche est celle d'un pantin désarticulé drapé dans des lambeaux de