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Libération
TRIBUNE

Rwanda, les mots du génocide

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par Jean-Pierre Chrétien
publié le 17 octobre 2008 à 6h51
(mis à jour le 17 octobre 2008 à 6h51)

La région des Grands Lacs est marquée par la hantise du génocide depuis un demi-siècle. D'autres régions d'Afrique ont connu des massacres abominables, mais ici nous assistons, de manière récurrente, à des projets d'éradication de tout un groupe en fonction de sa naissance, selon un critère dit «ethnique». Déjà en 1964, Bertrand Russell dénonçait les tueries de milliers de Tutsis au Rwanda, «le massacre le plus systématique depuis l'extermination des Juifs par les nazis». La contagion gagna le Burundi voisin, pourtant socialement différent, avec le génocide des élites hutues en mai-juin 1972 en «représailles» d'une vague de tueries anti-Tutsis dans le sud du pays. Enfin, entre avril et juillet 1994, le monde a découvert avec horreur l'entreprise d'extermination des Tutsis du Rwanda.

Cette logique infernale, longtemps méconnue au titre des «luttes interethniques» africaines, repose sur un racisme, qui a une histoire bien documentée et qu’on ne peut éluder d’un revers de manche.

Le Rwanda et le Burundi ont certes hérité d'un clivage, en voie patrilinéaire, entre Hutus et Tutsis, et d'un imaginaire social affectant à ces deux catégories des vocations contrastées, agricoles et pastorales. Autour du souverain du Rwanda s'était cristallisée au cours des XVIIIe et XIXe siècles une aristocratie, essentiellement composée de Tutsis, mais qui ne représentait au mieux que 5 % de l'ensemble de leur groupe.

Mais la globalisation raciale est venue dans le regard