Les réactions sont vives après la décision du juge Garzón d’ouvrir une enquête sur les disparus sous le régime de Franco, mort en 1975, pour «crimes contre l’humanité». Décryptage.
Pourquoi, soixante-dix ans après la Guerre civile, Baltasar Garzón décide-t-il d’ouvrir une instruction ?
Ses enquêtes sur le crime organisé, le démantèlement de la nébuleuse pro-ETA, les poursuites contre les anciens dictateurs latino-américains (l’arrestation de Pinochet à Londres en 1998) : courageux et avide de notoriété, le juge Garzón aime relever des défis et briser les tabous. Ardent défenseur d’une justice sans frontières, il n’a jamais caché son intention de «criminaliser» le franquisme, une page noire de l’Histoire espagnole jamais formellement condamnée. Le juge est passé à l’action jeudi, surfant sur une conjoncture favorable : une loi du gouvernement Zapatero, approuvée l’an dernier, accorde des «réparations» aux descendants des républicains fusillés par les franquistes. Les plaintes des associations de «mémoire historique» sont aussi à l’origine de l’initiative de Garzón, qui a chiffré le nombre de «disparus» à 114 266.
Pourquoi les réactions en Espagne sont-elles si épidermiques ?
Enthousiasme à gauche, sarcasme à droite. La Guerre civile (1936-1939) et les quatre décennies de dictature franquiste (jusqu'à la mort du Caudillo, en 1975) demeurent un sujet ultrasensible. Le Parti populaire (PP, conservateur) cultive l'ambiguïté sur l'ancien régime, dont il est l'hér