«C'est le plus grand procès de l'histoire politique récente de la Turquie», martèlent en boucle depuis hier matin toutes les télévisions du pays, alors que s'ouvrait à la prison de Silivri, à 60 km d'Istanbul, la première audience pour le jugement de «l'organisation terroriste Ergenekon», un nom qui se réfère à la patrie mythique des Turcs en Asie centrale.
Jamais vu. C'est en effet du jamais vu. Un acte d'accusation de 2 455 pages et 10 000 pages avec les annexes et autres documents. Quelque 86 personnes sont accusées «d'appartenir à une bande armée qui voulait fomenter un coup d'Etat». Le groupe aurait tenté de semer le chaos dans le pays avec des assassinats ciblés et des attaques visant des institutions comme le Conseil d'Etat afin de créer un climat favorable pour une intervention des militaires contre l'AKP, le parti au pouvoir, issu du mouvement islamiste de Recep Tayyip Erdogan. Lui-même aurait été visé par une tentative d'assassinat.
Le procureur demande la peine de prison à vie pour les cinq fondateurs et dirigeants présumés du groupe. En premier lieu le général en retraite, Veli Kucuk, considéré comme le fondateur et déjà mis en cause il y a dix ans pour avoir créé une organisation paramilitaire accusée d'organiser l'assassinat des opposants kurdes. Parmi les principaux inculpés figurent aussi Dogu Perinçek, ex-maoïste dirigeant d'un petit parti nationaliste, et le principal éditorialiste du quotidien Cumhuriyet (kémaliste), Ilhan Selçuk.