Tous les jours, il passe devant la prison. Win Tin tombe sur les guérites gardées et les murs infranchissables de la geôle où il a passé dix-neuf ans, deux mois et dix-neuf jours de sa vie jusqu'au 23 septembre. Ce jour-là, le plus ancien prisonnier politique birman a franchi la porte du gigantesque centre pénitentiaire d'Insein, au nord de Rangoun, tristement célèbre pour ses conditions de détention et sa pratique de la torture. Puis il a traversé une route bordée d'échoppes et gagné une ruelle calme et poussiéreuse. Là, recueilli par une famille amie, il vit chichement dans une petite maison cachée par un haut portail, à 300 mètres de son ancien lieu de détention. Win Tin accueille ses invités sur un fauteuil fatigué. «S'ils veulent me renvoyer en prison, je n'aurai pas beaucoup de chemin à faire», s'amuse ce dissident de 79 ans, ancien bras droit d'Aung San Suu Kyi avec qui il a fondé en 1988 la Ligue nationale pour la démocratie (LND).
Isolée dans sa paranoïa répressive qui l'a conduite à multiplier les arrestations d'opposants depuis plusieurs mois, la junte birmane réfléchira peut-être à deux fois avant de se saisir à nouveau de cet intellectuel réputé. Ancien journaliste, plusieurs fois primé pour ses actions et ses écrits, Win Tin jouit d'une notoriété internationale. En retrouvant la liberté à 79 ans, il est devenu malgré lui la figure de proue de l'opposition au régime. En résidence surveillée depuis 2003, Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix en 1991, pa