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Libération
Interview

«Le contrôle des images est illusoire»

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Eric Deroo, spécialiste de l’iconographie militaire :
publié le 6 janvier 2009 à 6h51
(mis à jour le 6 janvier 2009 à 6h51)

Spécialiste de l’iconographie militaire et coloniale (1), Eric Deroo, chercheur associé au CNRS, analyse les enjeux de la guerre des images à Gaza.

Pourquoi Israël bloque-t-il l’entrée des journalistes étrangers ?

Les états-majors, et pas seulement à Tel-Aviv, ont parfaitement intégré le fait que l’image est un élément clef de la guerre, qui peut faire basculer l’opinion. On l’a vu notamment au Vietnam avec la photo, devenue un symbole, de la petite fille sud-vietnamienne courant sur la route, à moitié brûlée par le napalm. Les Américains laissaient les photographes aller librement en première ligne et le monde voyait ce conflit dans toute son horreur. Les Nord-Vietnamiens, qui commettaient aussi pas mal d’atrocités, ont verrouillé leur communication et ont gagné la guerre de l’opinion. La leçon n’a pas été oubliée, comme on l’a vu depuis la première guerre du Golfe. Il y a par exemple aujourd’hui très peu de photos sur la guerre en Afghanistan. Pendant longtemps, le public n’avait vu que les images de son propre camp et, durant la Seconde Guerre mondiale par exemple, les Alliés parachutaient des brochures en Allemagne avec des photos montrant les défaites de la Wermacht. Tout a changé avec la télévision, un moment qui correspond à la guerre du Vietnam. Une nouvelle étape est franchie avec la banalisation d’Internet et des appareils de prise de vue, dont les téléphones portables.

Comment agissent aujourd’hui les images de guerre ?

Elles ont remplacé les mots et fonctionnent comme un alphabet de l’émotion. Au fil des conflits, elles deviennent de plus en plus horribles et de plus en plus «vrai