Ils sont des centaines, allongés sur des lits, le corps couvert de bandages, des hommes, des femmes et des enfants. La grande majorité d’entre eux ont été victimes de tirs d’artillerie, d’autres de balles perdues. Des fractures ouvertes, des brûlures, beaucoup d’amputations. Un carnage, caché du monde puisque les médias ne sont pas censés avoir accès à cet hôpital. Transformée en forteresse, la ville de Vavuniya, au nord du Sri Lanka, témoigne du triste sort que réserve aux civils la guerre qui oppose à huis clos les forces gouvernementales aux derniers Tigres tamouls.
Fuyant les combats qui se poursuivent sur la côte nord-est, plus de 15 000 civils ont déjà atterri dans cette bourgade, à soixante kilomètres au sud de Mullaittivu, la dernière grande ville aux mains des rebelles indépendantistes, reconquise le 25 janvier. Tous ces réfugiés sont placés sous le contrôle direct de l’armée, persuadée que des combattants se sont infiltrés parmi eux. Les valides sont parqués dans des camps, tandis que les blessés sont à l’hôpital, sous étroite surveillance.
Dans ce bâtiment, assise sur son lit, une vieille femme frêle a le bras coupé. «Je faisais la cuisine lorsque l'obus est tombé sur notre maison, raconte-t-elle. Mon mari est mort sur le coup.» Habitant dans les territoires rebelles, elle a été transportée d'hôpital en hôpital durant deux mois, au fur et à mesure que l'offensive de l'armée sri-lankaise progressait vers l'est. Jusqu'à ce que le Comité International