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grand angle

L'ombre des «prisons noires»

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Quand ils osent accuser les autorités locales ou leur patron, des Chinois se retrouvent séquestrés dans des geôles clandestines jusqu’à ce qu’ils retirent leur plainte. Comme Sun Yuyuan, une jeune femme qui en a réchappé.
publié le 1er avril 2009 à 6h52
(mis à jour le 1er avril 2009 à 6h52)

Le 28 septembre 2007 à Pékin, Sun Yuyuan reçoit un appel sur son portable. Une convocation urgente près du commissariat de police de Tianqiao. Son affaire, lui dit-on, est en voie d’être réglée. Cela fait deux ans que cette petite femme d’une quarantaine d’années, médecin, se bat contre la direction de sa mine de charbon du Heilongjiang, province du nord de la Chine. Sun Yuyuan a dénoncé la corruption des dirigeants, fonctionnaires, qui avaient détourné des logements attribués au personnel. Depuis, elle a été licenciée. Un an plus tard, elle a porté l’affaire dans la capitale, devant le Comité des biens de l’Etat. Après des mois d’attente, dans les hôtels miteux, à des milliers de kilomètres de sa fille de 11 ans, ce coup de fil est un miracle.

Vers midi, elle approche du commissariat. Une berline noire ralentit à sa hauteur. Une porte s'ouvre, quatre hommes en civil l'obligent à monter : «J'ai reconnu l'accent de ma province. Dans la voiture qui commençait à rouler, les hommes se sont mis à me frapper brutalement. Bientôt, on est arrivés devant un hôtel où d'autres hommes armés de matraques électriques m'ont tabassée à leur tour. J'ai compris que j'étais dans une prison noire.» Les plaignants, ces victimes d'injustices venus à la capitale dans l'espoir insensé d'obtenir justice devant la plus haute juridiction de Chine, parlent avec épouvante des «prisons noires». Pékin en compterait une centaine. Ce sont des hôtels, des appartements, des caves ou des bure