La junte ne pouvait pas manquer une telle opportunité. L’intrusion, dans la demeure de madame Aung San Suu Kyi, d’un citoyen américain, peut-être instrumentalisé, offre au régime militaire la possibilité inespérée de justifier un maintien en détention de plus en plus contesté. Rappelons que l’opposante birmane, lauréate du prix Nobel de la paix en 1991 pour son combat courageux contre l’un des régimes les plus oppressifs de la planète, a passé plus de treize des dix-neuf dernières années en résidence surveillée. Cela fait maintenant près de six années consécutives qu’elle est maintenue dans un isolement quasi total, en violation des lois internationales comme du droit national birman.
La loi sur la protection de l’Etat de 1975, en vertu de laquelle la «Dame de Rangoun» a été assignée à résidence, n’autorise en effet le renouvellement des ordres d’arrestation que durant un maximum de cinq ans. Constatant cette violation flagrante par l’Etat birman de sa propre légalité, l’ONU réclamait déjà en mars la libération de l’opposante. Un appel demeuré sans effet. L’acte irréfléchi d’un individu irrationnel va ainsi permettre de redonner un semblant de légalité à cette détention en tout point contestable. Pour l’avoir hébergée malgré elles, Aung San Suu Kyi et les deux femmes qui vivent à ses côtés risquent désormais, comme le médecin personnel de l’opposante, trois à cinq années d’emprisonnement pour avoir violé les restrictions qui leur étaient imposées.
Pour comprendre les raisons d