Vieux Pachtoun bourru aux allures de chef tribal, Bahadar Khan ronfle sur un lit de corde dans la cour de son hôtel. Le propriétaire du Tourists Inn, le lieu de rendez-vous des routards à Peshawar, a du temps, il n’a que deux clients en ce moment : une jeune Chinoise en vadrouille et un Australien de 50 ans, philosophe errant.
Inconscients. ll y a une dizaine de jours, ces derniers ont vu passer trois voyageurs français. «Ils venaient d'Islamabad, ils ont garé leur camping-car devant l'entrée de l'hôtel. L'un d'eux était en fauteuil roulant, raconte la Chinoise. Ils portaient des tuniques locales. Ils étaient du genre marginaux, un peu hippie, l'un avec une grande barbe, le dessus du crâne rasé et des cheveux longs sur les côtés. Un autre, plus propre sur lui, nous a dit qu'il était venu avec sa femme et ses enfants. Ils attendaient leurs visas pour l'Iran.» Il s'agit très probablement du groupe de français qui voyageait près de la frontière iranienne, lorsque l'un d'eux a été enlevé par des hommes armés et masqués. Le kidnapping n'a toujours pas été revendiqué.
Pour le Tourists Inn, ces voyageurs inconscients n'étaient que des clients habituels. Depuis vingt-cinq ans, ce petit hôtel installé dans une impasse du grand bazar a hébergé des générations de hippies et d'aventuriers en tout genre. L'hôtel est réservé aux étrangers. «Les Pakistanais n'ont pas le droit de venir pour que les femmes soient tranquilles», explique le propriétair