Il fait bon vivre en Chine. On s'enrichit, on consomme, on s'amuse, on voyage, on visionne tous les films du monde en version piratée, on tchate sur Internet. Il fait bon vivre, jusqu'au jour où, sans vraiment s'en apercevoir, on sort des clous. Pour un article «illégal», une rencontre avec un «personnage indésirable», une recherche poussée sur un événement «interdit», vous êtes «invité à prendre le thé» par d'aimables policiers en civil qui savent déjà tout de vous, de vos études à vos derniers rendez-vous. C'est un moment désagréable, où l'on vous fait signer une «autocritique» et la promesse d'arrêter toute «action subversive». La mésaventure peut s'arrêter là ou se poursuivre dans un camp de travail. Le risque existe, certains l'ont appris a leurs dépens. On ne sait jamais. Dans l'euphorie de «la réforme et de l'ouverture» prônées depuis trente ans et l'apparente insouciance au pays du «socialisme à caractéristiques chinoises», il est souvent difficile de mesurer la limite à ne pas franchir dans la Chine d'aujourd'hui. Il y a vingt ans, on disait «contre-révolutionnaire». Désormais, on ne sait plus trop. Depuis 1949, le pays se construit sur des trous de mémoire. Obnubilé par sa survie, le régime s'efforce de filtrer le passé, dans l'espoir insensé que le temps effacera les pages les plus sombres. Quel manuel d'histoire parle de la grande famine (30 millions de morts au début des années 60, conséquence du Grand Bond en avant) ? Qui a jamais raconté la Révolution culturel
Vingt ans ferme
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par Pascale Nivelle
publié le 2 juin 2009 à 6h52
(mis à jour le 2 juin 2009 à 6h52)
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