En Birmanie, les plus ironiques parlent du «nageur», les plus francs du «crétin». Et tous comprennent. John Yettaw a tout perdu et tout gâché. Ses palmes de pacotille, sa liberté et, surtout, la possible libération d'Aung San Suu Kyi qui arrivait, fin mai, au terme de sa détention. Dans la nuit du 3 au 4 mai, cet Américain de 53 ans a traversé à la nage le lac Inya dans le très surveillé nord de Rangoun, avant de gagner la maison de la dissidente birmane.
A cause de lui, la Prix Nobel de la paix encourt à nouveau cinq ans de prison pour avoir violé son assignation à résidence de 2003. Elle qui a déjà été privée de liberté pendant treize des dix-neuf dernières années. La pathétique performance de John Yettaw, passée un premier temps inaperçue aux yeux et à la barbe des cerbères birmans, lui vaut aujourd'hui d'être poursuivi pour entrée illégale dans une zone interdite et atteinte aux lois de l'immigration. «Il pourrait écoper au maximum de onze ans de prison, avant d'être extradé», confie son avocat birman, Khin Maung Oo.
«Vision». Selon le juriste mandaté par l'ambassade des Etats-Unis, Yettaw n'est pas vraiment rongé par le regret. «Il est très heureux d'avoir accompli cette mission que lui a confiée Dieu.» «Il a réussi à sauver» la «Dame de Rangoun». Car John Yettaw a eu une «vision».«Pour éviter qu'Aung San Suu Kyi soit assassinée par des terroristes, il est venu à Rangoun la prévenir qu'elle