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Guyane libre !

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Au XIXe siècle, un journaliste français se voit propulsé président d’une éphémère République de Counani. Un royaume d’opérette qui restera à l’état de pochade.
publié le 20 juillet 2009 à 6h53
(mis à jour le 20 juillet 2009 à 6h53)

Le texte, tapé à la machine, date du 14 mars 1961. Il est signé d'un certain Gaston de Chancenotte, aristocrate bisontin soucieux de coucher sur le papier des souvenirs épars pour sa descendance. Sa «note historique», hoquetante de ratures, est difficile à lire. Dans la cascade de noms destinée à graver une généalogie, l'un d'eux se pousse du col. Adolphe Brezet. Entré par alliance dans la famille en 1900, il y fit grand bruit. «Monsieur Brezet, dont le père avait fait fortune en Amérique du Sud, au Brésil, (ruiné par la suite) avait je ne sais comment, au jeu paraîtrait-il, racheté le territoire de COUNANI, entre la Guyane et le Brésil. Son père avait sans doute exploré ce pays et s'était assuré l'amitié des chefs des tribus indiennes et des habitants de COUNANI. Toujours est-il que ces droits acquis de façon plus ou moins obscure par les Brezet étaient réels et reconnus par les gouvernements anglais et français.» Un territoire gagné aux cartes. Un nom exotique, Counani. Un rêve : l'eldorado.

De l’Amazone au fleuve Oyapock

1886. Jules Gros se rengorge. Dans sa maison de banlieue, à Vanves, vient d'arriver un télégramme en provenance de Cayenne. Les habitants de Counani, une bourgade de 300 âmes outre-Atlantique, viennent de le propulser président à vie de la République de Guyane indépendante. Voilà cet ancien clerc de notaire, rédacteur au Petit Journal à la tête d'un territoire de 260 000 km2 qui s'étend de l'Amazone au fleuve Oyapock. Cette cont