Le journaliste Francis Deron, qui s'est éteint le 31 juillet à Paris à l'âge de 57 ans des suites d'un cancer, était l'une des quelques grandes signatures sur l'Asie. En mars, à la veille de l'ouverture du procès du tortionnaire Khmer rouge Douch à Phnom Penh, Francis avait été terrassé par un malaise cardiaque. Le lendemain, assis dans son lit de l'hôpital Calmette, un notebook calé sur les jambes, il suivait les dernières nouvelles, peaufinant son compte rendu sur l'audience du directeur de S-21. Une image qui définit cet homme, journaliste au quotidien le Monde depuis 1986 : reporter de terrain infatigable, à la fois incisif et discret, d'une grande culture et d'une curiosité toujours en éveil.
Francis venait de publier le Procès des Khmers rouges (1), un livre (lire ci-contre) qu'il définissait comme son regard personnel sur un sujet qu'il avait couvert depuis le début des années 80, lorsqu'il dirigeait le bureau de l'Agence France-Presse (AFP) à Bangkok. Sinophone et passionné de politique chinoise, Francis Deron avait très tôt opposé son bon sens et sa clairvoyance à ceux de sa génération qui s'enthousiasmaient avec véhémence pour le maoïsme. Les doctes sinologues, apologistes de la révolution culturelle, le faisaient sourire.
Journaliste au bureau de l'AFP à Pékin à partir de 1977, il avait couvert, avec Georges Biannic, le printemps de Pékin. Après son arrivée en 1986 au journal le Monde, à la demande du chef du service étranger Jacques Amalr