Le dromadaire se retourne, observe d’un œil mi-clos la colonne de soldats français et se rendort aussitôt. Accroupies sur le sol de pierres et de poussière, quatre femmes, des nomades kuchis aux tuniques vert et violet, gardent la tête baissée. Les soldats français sont à quelques mètres, collés au mur d’une maison. Ils avancent lentement. A tour de rôle, ils se positionnent au bout du mur, fusil-mitrailleur Famas à l’épaule. L’objectif de la patrouille, le village d’Anarjoy, est à une centaine de mètres. Ils doivent traverser à découvert avant d’atteindre la lisière des arbres. Un soldat s’allonge en position de tir dans un fossé. Deux Afghans, la trentaine, arrivent en poussant une brouette. Les militaires les observent sans rien dire. Les Afghans continuent d’avancer, comme s’ils n’avaient rien vu. Personne ne se parle.
Comme ce lundi 10 août, l'armée française mène presque chaque jour des missions de sécurisation dans le district de Tagab, au nord-est de Kaboul. Elle veut afficher sa présence, montrer qu'elle ose sortir de sa base. Mais l'armée et la population afghane forment deux mondes qui se croisent sans se connaître, qui s'observent, se jaugent, se défient. «La population ne nous aime pas. Dans certains villages, nous sommes même haïs»,reconnaît le colonel Francis Chanson, chef du corps du 3e régiment d'infanterie de marine (RIMa) de Vannes (Morbihan). Loin des discours officiels des généraux de l'Otan, la «bataille pour les cœurs et les espr