Un vieil homme est rentré hier dans son pays, après seize années d’exil forcé. Il n’aurait pas été l’ayatollah Khomeiny, l’événement n’en aurait pas été moins émouvant. Le nomade choisit sa route, pas l’exilé. Chassé par le Shah en 1963, celui qui est devenu le «guide» de son peuple au même titre que les Chinois ont pu parler de guide pour désigner Mao, a recollé deux parties de lui-même, et mis fin à une déchirure. L’intense émotion de la foule iranienne, qui avait littéralement submergé la capitale, traduisant bien ce moment exceptionnel où un peuple se retrouve, et s’identifie.
Il n’y a pas de bonheur plus grand que la chute d’une dictature. Et celui que le peuple iranien accueillait hier était tout simplement son libérateur. Fête essentielle au cours de laquelle un peuple se regarde, comme un enfant dans un miroir et qui, dans la joie, se reconnaît. Ce miroir, c’est le voisin, l’inconnu qui passe ou cet étranger que je suis, ce sont des hommes et des femmes qui ont perdu la marque de leurs conditions respectives, qui, toutes barrières effondrées, se rencontrent. Seuls les stades en folie pour d’exceptionnels jeux de ballons donnent parfois l’illusion de ces retrouvailles. Illusion fugace car le jour de la «libération» est le seul jour parmi tous les jours d’un combat, où un peuple ressemble véritablement à un peuple, à tout ce que ce mot évoque d’espérance, de pouvoirs, d’abus, de libertés et déjà de mensonges. Gouvernement d’un jour par des millions d’hommes et de femmes