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TRIBUNE

L’Etat peut-il dicter la politique mémorielle ?

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Modérateur René Solis, «Libération»
par
publié le 18 septembre 2009 à 0h00

JEAN-MARIE BOCKEL Secrétaire d'Etat auprès du ministère de la Justice

Les historiens des générations futures puiseront, sans nul doute, dans la séquence des lois dites mémorielles, un matériau qui livrera des clés indispensables à la compréhension d’une période historique, où la tension entre mémoire et histoire aura été portée à son paroxysme. Ces esprits critiques et dépassionnés se pencheront sur cette crise que Pierre Nora avait qualifiée d’abus de mémoire, soulignant que sa revendication comme devoir participait d’une perte de substance. Ils relieront cette montée en puissance de la mémoire à l’émergence de revendications identitaires, conjuguées à une exigence de reconnaissance, qui avaient été au centre du débat démocratique. Ils rappelleront que l’histoire ne prétend pas - quant à elle - à reconnaître, elle reconstruit et elle considère à ce titre la mémoire comme l’un de ces plus nobles matériaux. Ils relateront, enfin, les modalités de guérison d’une conscience collective revenue à l’apaisement. Sans attendre cette contribution des historiens du futur, il convient de revenir sur cette séquence pour en analyser les enjeux : relations entre l’historien et le législateur, donc, aussi, entre l’historien et le juge, rôle et limites de la loi au regard de la vérité historique, tensions entre mémoire et histoire, élaboration d’une politique de la juste mémoire, qu’appelait de se vœux Paul Ricœur, respectueuse du principe de la liberté de recherche histor