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Libération
Portrait

Gentil petit tyran

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Alfredo Stroessner. A 34 ans, le petit-fils de l’ancien dictateur se verrait bien président du Paraguay. Mais façon social-démocrate…
publié le 23 septembre 2009 à 0h00

Imagine-t-on un trentenaire latino-américain se présenter sous le nom de Jorge Videla, Anastasio Somoza ou Augusto Pinochet ? Un trentenaire tout sourire et au naturel désarmant, qui plus est ? Ce jeune homme qui nous serre la main, une armoire à glace au cheveu châtain clair, c’est Alfredo Stroessner, petit-fils de celui qui tint le Paraguay d’une main de fer entre 1954 et 1989. Un dictateur de république bananière qui incarcéra, tortura et força à l’exil des milliers d’opposants, coupables d’embrasser le communisme ou simplement de ne pas courber l’échine. Un patriarche à la García Márquez qui a façonné une image honteuse de ce petit pays enclavé et qui, lors de son automne, dut finir ses jours sans gloire à Brasília.

Et voici donc face à nous un jeune premier triomphant, avec ses faux airs de rejeton de la dynastie Kennedy, qui revendique l'héritage de cette figure honnie. Car non seulement Alfredo Stroessner junior ne se distancie pas de grand-papa, mais il s'en réclame. «Je suis fier de porter son nom. J'ai l'air aussi allemand que lui, pas vrai ?» lance-t-il de sa voix de stentor, gonflé d'assurance, évoquant avec émotion les origines bavaroises de son parent. Les épaules d'un troisième ligne de rugby, des yeux bleus qui cherchent à clouer leur pouvoir de conviction dans votre pupille, Stroessner se pavane en triomphateur, indifférent à la sueur qui goutte sur sa chemise impeccablement blanche et son costume de lin ocre clair.

On se trouve au cœur d’Asunción, à