Michel Sidibé, spécialiste malien de santé publique, est depuis un an le nouveau directeur de l’Onusida.
Vous venez d’annoncer que le nombre de personnes sous traitement antisida est passé à 4 millions fin 2008, soit un million de plus en un an. Peut-on s’en satisfaire ?
Bien sûr cela reste insuffisant, mais la progression est forte. Cela montre que le mouvement de lutte contre le sida reste une force de transformation unique. Rappelez-vous, il y a cinq ans, ils étaient 400 000 séropositifs sous traitement dans le monde. Dix fois plus maintenant. Dans l’histoire des maladies, il n’y a pas de succès équivalent à cette échelle.
On reste loin du compte…
C’est vrai qu’on est loin du compte. D’autant que ce rapport révèle une bombe à retardement. Aujourd’hui, les gens qui ont besoin de traitements, mais qui n’en ont pas, sont autour de 5 millions. L’Organisation mondiale de la santé vient d’émettre de nouvelles recommandations : il s’agit de traiter les gens plus tôt dans l’évolution de leur maladie. Mais avec ce nouveau protocole, ce sont 15 millions de personnes qui ont besoin de trithérapies. Comment va-t-on faire, en particulier en matière de financements ?
Votre réponse ?
Il va falloir innover. Tout l’enjeu est d’arriver peu à peu à intégrer la prise en charge des malades dans des systèmes d’assurance-maladie. Et ce n’est pas une utopie : il y a des exemples, au Rwanda et en Ethiopie, de début de protection sociale. Il faut aller vers une assurance-maladie universelle.
Cette course n’est-elle pas perdue d’avance ?En un an, un million de personnes ont été certes mises sous traitement, mais parallèlement, il y a eu 2,7 millions de personnes nouvellement infectées…
Ce décalage est terrifiant, l’épidémie ne s’essouffle pas. Trois fois plus de nouveaux contaminés que de patients mis sous traitement : le défi est énorme. Il faut changer de vitesse, mais aussi aller vers une diploma