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Libération
TRIBUNE

La Norvège piégée par son consensus

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par André Grjebine, Directeur de recherche à Sciences-Po, Centre d’études et de recherches internationales.
publié le 2 octobre 2009 à 0h00

La Norvège est généralement connue comme un pays où prévalent la cohésion sociale et le consensus autour de valeurs telles que la solidarité et le refus de l’exclusion. Pourtant, lors des dernières élections législatives, un parti populiste, sinon d’extrême droite, le Parti du progrès, y a obtenu 22,9% des suffrages, ce qui en fait le deuxième parti norvégien, et ceci pour la deuxième fois consécutive. Ne faut-il pas attribuer ce résultat précisément à ce qui devait prémunir la Norvège contre toute poussée extrémiste : la constante préoccupation, non seulement des principaux acteurs politiques, mais de la société, d’éviter à tout prix les conflits ouverts, qu’ils soient publics ou privés ?

Comme de nombreux ouvrages et films scandinaves le suggèrent, le revers d’une recherche systématique du consensus se trouve dans la crainte d’une marginalisation éprouvée par celui tenté d’exprimer des opinions contraires à ce que la majorité considère comme «moralement acceptable». Dès lors que le politiquement correct empêche les partis traditionnels d’aborder clairement des questions qui inquiètent l’opinion - telle l’immigration ou les insuffisances de l’Etat-providence malgré les revenus pétroliers -, ils laissent le champ libre à des mouvements extérieurs au système politique traditionnel.

On peut transposer à la Norvège l’explication de ce paradoxe que deux sociologues, Paul Sniderman et Louk Hagendoorn, avancent pour le cas assez comparable des Pays-Bas : la pression conformiste cond