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grand angle

Paraguay, père et file

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Sept Paraguayens sur dix ne sont pas reconnus par leur paternel, un record. Une vieille tradition que les femmes remettent en cause.
publié le 12 octobre 2009 à 0h00

«C’était il y a quelques années. Comme chaque soir, je me rends dans un bar en face du magazine où je travaillais alors. Le patron, un ami à moi, me lance : « Tu sais, Hugo, l’autre jour, ton frère était là, à côté de toi, accoudé au comptoir une bière à la main. Il n’a pas osé te saluer ! »»

En racontant l'anecdote, Hugo part dans un grand rire. Il ignorait l'existence de ce demi-frère et il en resta bouche bée. Aujourd'hui, Hugo Garay a la cinquantaine, il dirige la radio Boreal Chaco. C'est un gaillard aux larges épaules, à la figure bonhomme, la peau mate des métis paraguayens. Il nous conduit à travers les grandes artères d'Asunción, la capitale, dans le froid pluvieux de juillet. «Attends, ce n'est pas fini. Quelques semaines plus tard, je suis invité à un festival culturel à l'intérieur du pays. Des officiels me donnent l'accolade. L'un d'eux me fait un drôle de sourire. "Sais-tu qui je suis ? - Je n'en ai pas la moindre idée- Je suis ton frère, Antonio !» Un autre frère. Par son intermédiaire, Hugo retrouve la trace de son père, qu'il n'avait jamais revu depuis le berceau. Un policier à la main lourde, la terreur de sa bourgade natale. La mère de Hugo, terrorisée, avait pu échapper à son emprise et rejoindre clandestinement Asunción. «J'ai donc revu mon père dans les dernières années de sa vie. Sans grand plaisir, à vrai dire. Il m'avait oublié. J'ai appris qu'il avait eu quatre autres fils reconnus et une tripotée d'illégitimes. Je n'ose pas imagine